Villages ouvriers et villes-usines à travers le monde
Édition de Gracia Dorel-Ferré
Laboratoire Langages, Littératures, Sociétés, Etudes Transfrontalières et Internationales
Université Savoie Mont Blanc
N° 6
L'habitat ouvrier, issu des siècles de l’industrie fait partie de notre paysage. Nous sommes si habitués à le voir que nous sous-estimons, le plus souvent, sa nature et son importance. Parfois, il s’imbrique dans le tissu urbain, d’autres fois, c’est au contraire l’uniformité d’une seule et même architecture, occupée par une couche sociale homogène qui détermine la physionomie des lieux. Comme objet d’histoire, il apparaît avec l’industrialisation au point de se confondre avec elle. Comme création particulière des siècles de l’industrie, l’habitat ouvrier se complexifie avec le temps. À partir du milieu du XXe siècle, l’habitat ouvrier se confond avec l’habitat social. Compris comme un legs de la société passée, il fait partie de notre environnement et peut être récupéré: c’est là que se place la question de la rénovation du patrimoine industriel et de sa signification.
Caractérisé par des conditions sommaires, quand il existe, l’habitat ouvrier est l’objet des préoccupations des industriels, des hygiénistes et des hommes d’État, pendant tout le XIXe siècle, au point de fournir le thème principal de l’exposition universelle de Paris en 1867. On peut penser que l’habitat social du XXe siècle est directement inspiré de toute cette recherche qui aboutit au concept de cité-jardin et qui inspire largement la construction des habitations bon marché (les HBM) en France.
L'habitat ouvrier se complexifie avec le temps. À partir du milieu du XXe siècle, l’habitat ouvrier se confond avec l’habitat social. Compris comme un legs de la société passée, il fait partie de notre environnement et peut être récupéré: c’est là que se place la question de la rénovation du patrimoine industriel et de sa signification.
Avant-propos
Denis Varaschin
Introduction : Villages ouvriers et villes usines, un patrimoine industriel
Gracia Dorel-Ferré
I. Des manufactures aux usines (XVIIe siècle - début XIXe siècle)
Un village ouvrier au XVIIIe siècle : l'ensemble historique des usines à métaux de Riopar (Castilla-La Mancha, Espagne)
Marta Vera PrietoVivre dans les manufactures bourboniennes d’Espagne
Gracia Dorel-FerréA la recherche d’une architecture fonctionnelle : les villages ouvriers de David Dale (Ecosse) 1783-1806
David J. McLarenLes villages cotonniers d’Écosse, un patrimoine
Mark WatsonReal de Catorce, ville minière
María Haydeé García Bravo
II. Du village ouvrier à la cité-jardin (fin XIXe siècle-première moitié du XXe)
Le logement ouvrier en Haute-Normandie : 1850-1939
Jean-Bernard CremnitzerLe village ouvrier du Bois-du-Luc, un exemple empirique et évolutif d’ingénierie sociale
Karima HaoudyL’épopée de la famille Cadbury dans l’industrie du chocolat en Angleterre et l’avènement de la cité-jardin
Jean-Luc RigaudPour une archéologie de la colonie industrielle
Pablo López CalleLes cités ouvrières de l’Oural (XVIIIe-XXe siècle) et l’émergence d’une culture industrielle régionale
Elena Alekseeva, Elena KazakovaCoopératives villageoises dans le Japon rural du XIXe siècle
Toshitaka MatsuuraChemin Vert, une cité-jardin emblématique
Gracia Dorel-Ferré
III. L’exportation des modèles (Fin XIXe - XXe siècle)
L’habitat ouvrier dans les villes du canal de Suez
Claudine PiatonL’habitat du sucre au Brésil
Gabriela CampagnolL’habitat sucrier au Texas, Etats-Unis. D’un village ouvrier à un quartier périphérique urbain : Sugar Land et l’Imperial Sugar Company
Gabriela CampagnolLes villages du salpêtre (Chili)
Valentine AldebertLe Village Ouvrier de Tafi Viejo à Tucumán, Argentine
Monica FerrariFray Bentos : une cité ouvrière de l’industrie de la viande (Uruguay)
René Boretto OvalleRéflexions autour de la conservation intégrée, partagée et participative du paysage culturel le cas de Paranapiacaba, Sao-Paulo, Brésil
Vanessa Gayego Bello Figueiredo« On vit comme à Moscou » : l’habitat et l’auto-identification dans les villes fermées nucléaires d’URSS
Natalia MelnikovaLa passion ne meurt jamais. Étude du développement historique, du statut actuel et des mesures de protection des villages ouvriers en Chine (1840 – 1980)
Xiang Mingming, Li GuoL’industrie pétrolière et la ville : Abadan (Iran)
Pirooz Hanachi, Sara TaymourtashArvida, ou l’invention de la maison des travailleurs du « métal magique » au Canada
Lucie K. Morisset
Index
Table des illustrations
Avant-propos
Denis Varaschin
Ayant passé la plus grande partie de mon enfance dans une cité ouvrière, l'ouvrage de Gracia Dorel-Ferré est pour l'universitaire en fin de carrière que je suis aujourd'hui plus qu'un livre d'histoire.
La « Cité de l'avenue Ampère », car tel était le nom que lui donnaient ses habitants, jouxtait le canal de Jonage et l'usine hydroélectrique de Cusset. Elle mêlait des vestiges venus de la fin du XIXe siècle, comme le garage en bois qui abrita la première automobile de la famille, une Dauphine bleu azur de la Régie nationale des Usines Renault, à des constructions érigées progressivement jusqu'aux années 1970. Toutes possédaient des jardinets, dont la mise en valeur pouvait devenir source d'émulation. Par la grâce d'un logement de qualité, le plus souvent individuel, le monde ouvrier accédait à une vie qui le rapprochait de la petite bourgeoisie. En tout cas, il aimait à le croire.
Les enfants de ma génération, qui jouaient ensemble dans cette rue, sont partis poursuivre leur vie, avec des fortunes diverses. Le hasard les fait parfois se retrouver, comme récemment encore dans les rues de Chambéry. Ils évoquent alors «l'avenue Ampère », avec tendresse. Ils le savent aussi, de manière quelque peu idéalisée, en pensant aux courses en vélo, au laitier et au ferrailleur qui passaient par là, aux parents disparus... La cité, lieu de vie et de sociabilité, née dans l'esprit généreux et pragmatique d'un patronat textile catholique puis développée par une puissante entreprise publique nationale, EDF, reflétait dans son espace une vision sociale, une hiérarchie qui ne cachait pas (« l'allée des chefs ») des identités différenciantes (ceux de l'usine, ceux l'atelier), qui nourrissaient bien des rancœurs et autres inimitiés typiques des mondes clos, renforcées par le fait, qu'en ce temps là, les épouses restaient au foyer.
Aujourd'hui, la cité de ma jeunesse s'est étiolée, comme le monde ouvrier, et elle n'est plus celle de mon enfance. La revoir m'inspire un certain malaise. Pour autant, je ne peux me retrouver dans une cité, comme ce fut récemment le cas à Mulhouse, sans poser un regard tendre et inquiet pour l'avenir sur ces enfants d'ouvriers qui jouent avec insouciance dans les rues. Le livre de Gracia Dorel-Ferré, ode au renouvellement d'une forme architecturale support de vie sociale en longue durée, nous oblige à un optimiste raisonné !
En effet, Gracia Dorel-Ferré offre ici d'abord et avant tout un livre à son image. La fidélité, la lucidité, le sérieux dans le travail ; et aussi le courage, la ténacité, la détermination ; et enfin l'élégance, la sensibilité, en un mot l'humanité. Tout cela avec sa vaste érudition qui lui permet d'embrasser largement un phénomène complexe, de l'Antiquité à nos jours et dans une vision planétaire. Loin de toute histoire d'une globalisation désincarnée, son texte s'enracine dans la réalité, celle du patrimoine, du monde du travail et des hommes, des héros aux anonymes de la société industrielle et de la croissance, des puissants et des humbles, des patrons et des cadres aux contremaitres, ouvriers et employés. Se soucier d'eux, sans tendresse feinte ni angélisme déplacé, c'est leur rendre hommage et leur faire justice.
Date de première publication du titre: 25 avril 2016
ISBN-10 2-919732-52-8
ISBN-13 978-2-919732-52-4
GTIN13 (EAN13) 9782919732524
Publication Chambéry, France
Nombre de pages de contenu principal 288
Illustrations 308 Illustrations couleur
Format 24 x 30 x 2 cm
Poids 1405 gr